MISSION ACCOMPLIE — Une correspondante de la BnF m’a envoyé une photographie en couleur des « Dossiers secrets » d’Henri Lobineau

Il y a quelques jours, j’ai lancé un appel public sur mon site internet afin de rechercher quelqu’un qui pourrait m’aider et se rendre à la Bibliothèque nationale de France à Paris pour prendre une photo en couleur de la planche No. 2 des « Dossiers secrets d’Henri Lobineau ». Ce document se trouve sur le site de Tolbiac (site François-Mitterrand) à la cote 4° LM1 249 et n’est pas accessible au public. Je possédais depuis de nombreuses années une photocopie de mauvaise qualité de ces « Dossiers secrets » qui m’avait été remise par le chercheur et historien d’art Robert Tiers, mais il m’avait été impossible jusqu’à ce jour d’obtenir une copie en couleur. Récemment, j’ai décidé de commander un exemplaire de ce même dossier auprès de la Bibliothèque nationale de France, espérant recevoir une copie en couleur. Malheureusement, cette exigence fut impossible pour des raisons de droits particuliers.

Portrait du roi Alaric I conservé à la Bibliothèque nationale de France.

Comme je l’ai expliqué dans mon article précédent,  je m’intéresse à ces « Dossiers secrets » parce qu’il y a une trentaine d’années, j’avais débuté des recherches historiques et généalogiques qui m’avaient amené à séjourner en Europe et à parcourir des axes géographiques très importants comme la région du Razès, de la Bretagne et des Ardennes. Mais je m’intéresse plus particulièrement à ce document parce qu’on y retrouve le « blason » de Bera le Jeune (né en 876) qui est similaire à celui de notre famille : “De gueules à une patte d’ours d’or”. Seule la couleur de l’écu diffère, celle des de Bouillanne étant azur (bleu). Bera est le petit-fils Sigisbert VI, dit « Ursus » (c’est-à-dire “Ours”), lui-même descendant du roi mérovingien Dagobert II.

Évidemment, nous savons très bien que le blason n’est apparu qu’au XIIe siècle au sein de la chevalerie. Les origines de l’héraldique sont intimement liées à l’évolution des guerres féodales Alors que dans l’Antiquité les peuples belligérants se différenciaient aisément par le costume, il en allait autrement dans les guerres féodales. Les larges boucliers de forme ronde ou en amande en usage à l’époque donnèrent la solution. Leur surface visible de loin se para de signes simples comme la fasce, le pal ou le chevron, augmentés de couleurs vives. Une grammaire graphique s’instaura, l’art héraldique était né. L’efficacité de ce système fut telle qu’à la fin du XIIe tous les féodaux d’Europe utilisaient l’héraldique. Le blason représentait l’identité de son possesseur au même titre que le patronyme. (Le héraut d’armes)

En ce qui concerne Bera le Jeune et Sigebert VI, la présence de la patte d’ours s’explique par le fait qu’il y eut plusieurs alliances entre les Wisigoths et les Mérovingiens, par exemple le mariage de la princesse wisigothe Brunehaut avec Sigisbert Ier, roi de Metz. Pour sa part, Dagobert II épousa en Irlande Mathilde, une princesse celte. Leurs enfants sont : Hermine, Rotilde, Adèle et Ragnetrude. Le roi d’Austrasie épousa en deuxième noce Gisèle de Rhedae, fille de Béra II, comte de Rhedae, d’origine wisigothe. Leur enfant Sigisbert IV fit souche dans le territoire de son grand-père, le Razès, après que son père fut assassiné en 679 à la fontaine d’Arphays, près de Stenay.

Or, l’ours était l’animal-totem des Wisigoths qui conservaient une croyance dans le culte de l’ours comme animal déifié. Le roi des Wisigoths Alaric Ier (395-410) était souvent représenté recouvert d’une peau d’ours, par exemple dans le tableau du peintre allemand Ludwig Thiersch (vers 1879) conservé au musée Neue Pinakothek, à Munich, ou bien encore dans la gravure conservée à la BnF, à Paris.

« Alarich à Athènes », du peintre allemand Ludwig Thiersch (vers 1879). Le musée Neue Pinakothek, à Munich – Collections de peintures de l’État bavarois (Bayerische Staatsgemäldesammlungen) : www.sammlung.pinakothek.de.
Le roi des Wisigoths Alaric Ier recouvert d’une peau d’ours.

Je possédais donc depuis près de trente ans une très mauvaise copie en noir et blanc des « Dossiers secrets d’Henri Lobineau ». J’eu alors l’idée de lancer un appel sur mon site internet afin de trouver quelqu’un qui pourrait se rendre à la BnF et faire une photo en couleur du document. Deux jours plus tard, je recevais un courriel d’une dame qui travaille à la Bnf de Tolbiac : « Je pourrais faire une photo mais j’aurai du mal à avoir le livre, comme il existe en microfiches et que je ne travaille pas dans le département où il est présent. Je sais que sur certains documents en magasins en rez-de-jardin, lorsqu’il existe des microfiches, nous sommes censés communiquer ceux-là, de plus le statut de ce livre est non communicable. Il est possible de faire une demande de communication exceptionnelle. » Après quelques difficultés, ma correspondante m’annonça le 22 février qu’elle avait réussi à prendre des photos du document qu’elle m’envoya prestement. Ce geste est grandement apprécié et je remercie vivement ma correspondante !

Ces « Dossiers secrets d’Henri Lobineau » ont toujours eu une importance pour moi puisqu’on y retrouve le « blason » de Sigisbert VI symbolisé par la patte d’ours, tout-à-fait similaire au blason de la famille de Bouillanne. Bien sûr, ceci n’est pas dû au hasard. En effet, comme je l’ai déjà mentionné dans un précédent article, le vicomte de Nîmes Sigisbert VI, surnommé le prince Ursus, est à l’origine de la famille de Bollana qui fit souche dans le sud de la France, plus précisément à partir du village de Bouillargues, au sud-est de Nîmes dans le Gard. En 916, le village se nomme Bulianicus ; peu après, ce sont les noms de BolianicusBollanicaeBollanicisBolhanicis, puis Bolhargues qui s’imposent. Par la suite apparaît le nom moderne de Bouillargues. Les membres de la famille de Bollana auraient donc été tout naturellement les seigneurs de Bollanicis.

Le lien que l’on peut tracer est alors très mince entre les seigneurs de Bouillargues, dans le Gard, et la famille de Bouillanne (Bolianicus, Bollanicae, Bollanicis, Bollana, Boliana), dans le Dauphiné. D’ailleurs, une charte du Cartulaire de Léoncel, celle « d’Adhémar Richau de Rouisse et de quelques autres au sujet d’Ambel », datée du 21 septembre 1245 et traitant de la confirmation d’une donation au monastère, cite parmi les témoins un dénommé Umberto de Bollana, c’est-à-dire Humbert de Bouillanne.

Au centre : le blason du prince Ursus selon les Dossiers secrets d’Henri Lobineau. À gauche : le blason de la famille Bouillanne. À droite : le blason de la famille Planta.

Comme le précise Frédéric Mistral, l’ancienne dénomination de ce lieu était Bulianicus, Bolianicus, Bollanicae, Bollanicis, Bolhanicis, du nom d’un domaine appelé Bouillanus, situé près de Rome. Pour lui, le nom de famille dauphinois, de Bouillanne, dérive aussi du provençal Bouiano, Boulhano et Bouiant.

Dans un document distribué entre 1932 et 1935 et aujourd’hui introuvable, le Bulletin paroissial de l’Abbé Millon, nous retrouvons des informations rares concernant la famille Bolian. Si nous en croyons André Lacroix, les Bolian ou Boulian, ou encore Bouillan, de Paladru, appartiendraient à la famille des de Bouillane dont ils seraient l’une des branches. Les variations du nom Bolian comprend : Bullen, Bulen, Bullan, Bulloyne, Bouleyne, Bulleyn et beaucoup plus (Forebears).

Le nom Bolian s’est retrouvé dans divers comtés à travers la Grande-Bretagne. La plus ancienne inscription du nom semble être Gilebert de Bollon dans le Northumberland, en 1168. Plus d’un siècle plus tard, le Rotuli Hundredorum de l’an 1273 énumérait : Pharamund de Boloynne dans le Buckinghamshire; Richard de Boloyne à Somerset; John de Boloyne dans le Cambredge; et Thomas Boloyne dans l’Essex. Fait intéressant, les rouleaux répertorient également Simon, comte de ‘Buloyne’ comme résidant à Oxford. Dans l’Histoire de Norfolk, Simon de Boylen a été inscrit à la même époque. Certains membres de la famille Bolian ont immigré en Irlande. Il est à noter que Pharamund est une réminiscence du légendaire Pharamond, le premier roi mérovingien, fils de Marcomir et père de Clodion le Chevelu.

Au fil du temps et des alliances le nom des de Bouillanne s’est transformé, tout comme le meuble de la famille — la Patte d’Ours —, a évolué de différentes manières au sein des blasons successifs.


Les Dossiers secrets d’Henri Lobineau

Les Dossiers secrets d’Henri Lobineau (aussi appelés le Dossier Lobineau ou les Dossiers secrets) sont une série de documents dactylographiés, élaborés par le français Pierre Plantard et son ami Philippe de Chérisey puis déposés entre 1964 et 1967 à la Bibliothèque nationale de France sous la forme d’un don anonyme. Ces documents seraient des « preuves inventées par les auteurs dans le but de mettre en place une monarchie française dirigée par un descendant des rois Mérovingiens ». Ils sont enregistrés sous la cote 4° LM1 249 et sont datés de 1975 dans le fichier central. Ce ne sont nullement des parchemins mais des documents contemporains, aujourd’hui microfilmés et accessibles aux chercheurs. Ils se présentent comme un mince volume, chemise à couverture rigide contenant un assemblage hétéroclite de documents : coupures de presse, lettres, encarts, plusieurs arbres généalogiques et pages imprimées d’autres ouvrages, et à plusieurs reprises d’ailleurs subtilisées puis remplacées par d’autres, elles-mêmes surchargées parfois de notes et de corrections manuscrites.

Les recherches récentes montrent que derrière ces dossiers soi‑disant manipulés, une part historique se révèle être de plus en plus pertinente et rejoint un vaste ensemble d’indices, de sources diverses, et directement liés à l’énigme des deux Rennes. Férocement critiqués et exploités pour des raisons qui n’ont rien à voir avec la raison pour laquelle ils ont été créés, ces dossiers contiennent d’importants indices historiques et généalogiques qui se rattachent également à l’histoire de Rennes-le-Château et Rennes-les-Bains.

Le dernier lot de documents fut déposé à la Bibliothèque Nationale de France en avril 1967 sous le nom d’Henri Lobineau et concerne « Les Dossiers secrets Lobineau » rassemblés par un certain Philippe Toscan du Plantier. Ce titre donnerait non seulement un nom à la série, mais une ultime indication sur l’identité de l’auteur. Ce dernier recueil complète ainsi le processus de dévoiler au grand public le Prieuré de Sion. Les dossiers sont aujourd’hui microfilmés et accessibles aux chercheurs.

Parmi ces dossiers, un manuscrit datant de 1956 affirme l’existence d’une société secrète, le Prieuré de Sion, et relate son histoire depuis sa fondation en 1099 par Godefroy de Bouillon. On y trouve aussi la liste des grands maîtres qui se seraient succédé à la tête de l’organisation depuis le XIIe siècle, parmi lesquels figurent Léonard de Vinci, Isaac Newton, Victor Hugo, Claude Debussy, Jean Cocteau.

Jean Tardy
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« Bonjour M. Boulianne. Un mot pour vous dire que vos blogs sont très intéressants. Vous devez travaillez très fort dans ce grand combat et je vous en suis très reconnaissant. »

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