Marie Boyer de Bouillane, dame d’honneur de S.A.R. Madame la duchesse de Vendôme

Membre de la grande famille des Fils de l’Ours (la plus ancienne noblesse du Dauphiné), mon arrière-arrière-grande-cousine au treizième degré, Marie Boyer de Bouillane, était la dame d’honneur de Henriette de Belgique, duchesse de Vendôme et d’Alençon. Marie Boyer de Bouillane est le deuxième enfant du magistrat et avocat à la Cour d’Appel de Paris Pierre Paul Henri Dominique Boyer de Bouillane (1848-1908), chevalier de Saint Grégoire le Grand, et de Jeanne Françoise Thérèse Nicolet (1859-1934).

Paul Boyer de Bouillane était le fils de Austremoine Boyer et de Marie Anne Julie Mathilde Tropenas. Conçue en dehors des liens du mariage, cette dernière était la fille naturelle du magistrat Antoine Henri Etienne de Bouillane de Lacoste, bien que sa mère fut mariée avec André Michelland depuis le 29 juillet 1829. En effet, tous les éléments en notre possession indiquent que Bouillane de Lacoste était le véritable père de Mathilde Tropenas. Il l’adopta à sa majorité, le 28 octobre 1841, après que André Michelland fut décédé.

Paul Boyer de Bouillane comprit rapidement l’importance d’adopter le nom de son grand-père naturel pour son avenir et celui de sa postérité. Le 9 septembre 1874, il reçut l’autorisation officielle d’ajouter à son patronyme le nom de sa famille de sang, de Bouillane, et de s’appeler à l’avenir Boyer de Bouillane, nom désormais transmissible (Bulletin des lois de la République Française). Paul Boyer de Bouillane était le demi-frère du célèbre homme de lettres Philoxène Boyer, né du premier mariage de Austremoine Léger Boyer avec Françoise Célinie Moutet.

Bulletin des lois de la République Française, Volume 2, Volume 9é No.231. 1874
Décret du Président de la République Français (9 septembre 1874).

Le 23 octobre 1928, Marie Boyer de Bouillane assistait aux obsèques de la princesse Sophie d’Orléans (1898-1928), fille du duc et de la duchesse de Vendôme et d’Alençon, en la chapelle royale de Dreux. En tête du deuil royal, la reine Amélie de Portugal représentait le duc de Guise, puis venaient le baron de Gaiffier d’Hestroy, ambassadeur de Belgique, représentant le roi des Belges, oncle de la princesse défunte ; le prince de Monaco, puis les princes et princesses et les membres du service d’honneur. A gauche prirent place : la duchesse de Vendôme, la princesse Geneviève d’Orléans, comtesse de Chaponay ; la princesse Alphonse de Bavière, le prince Louis d’Orléans-Bragance et la princesse Isabelle d’Orléans-Bragance, représentant le prince et la princesse Pierre d’Orléans-Bragance. (Le Littoral)

Maxime Real del Sarte
Maxime Real del Sarte

Le 16 juin 1929, elle représentait le duc et la duchesse de Vendôme aux obsèques de Mme Real del Sarte, épouse Maxime Real del Sarte, décédée à Pau. Les funérailles eurent lieu à l’église Notre-Dame des Champs à Paris. Parmi les personnalités présentes se trouvaient M Maurice Emery, représentant la reine Amélie de Portugal, la duchesse de Magenta, représentant le duc et la duchesse de Guise, Pierre de Nolhac de l’Académie française, etc. Le mari de la défunte, Maxime Real del Sarte (1888-1954), est un sculpteur français réputé, fondateur et chef des Camelots du roi. Il est le fils du sculpteur Désiré Real del Sarte et de la peintre Magdeleine Real del Sarte (elle-même fille du musicien François Delsarte et cousine de Georges Bizet). C’est après un incident dans l’affaire Dreyfus qu’il prend contact avec les représentants de l’Action française. Le chef des Camelots du roi est dès lors de tous les combats du mouvement nationaliste et monarchiste, parmi lesquels la célèbre affaire Thalamas, du nom de cet historien qui essaya de professer à la Sorbonne un cours sur Jeanne d’Arc. Elle valut à Maxime Real del Sarte un séjour de dix mois à la prison de la Santé. (L’Express du Midi)

Célibataire et sans enfant, Marie Boyer de Bouillane était une femme pieuse s’étant dévouée sa vie durant à S.A.R. Madame la duchesse de Vendôme et aux oeuvres de charité. En 1938, elle collabora à l’établissement, à Rome, d’un Carmel français dont l’unique vocation serait de prier et de s’immoler pour que la France redevienne la « Fille aînée de l’Eglise ». Les intentions furent contrôlées par les autorités ecclésiastiques, par Sa Sainteté le Pape Pie XI qui donna toute approbation au projet, de même que le Cardinal Vicaire. On lit dans le bulletin du diocèse de Quimper et Léon : « Nous laisserons-nous vaincre en générosité par ces saintes Carmélites et n’aurons-nous pas à cœur d’aider à cette fondation qui doit leur permette de prier et de souffrir pour le salut de la France ? On peut adresser les offrandes : à Mme la Prieure du Carmel, via Labisco 43, Torpignattara, Rome, à Mlle Boyer de Bouillane, 41 rue du four, Paris 6e, à la Comtesse de Franqueville, 74 rue de l’Université, Paris 7e. » (6 janvier 1938, page 149).

Correspondance entre Marie Boyer de Bouillane, le duc et la duchesse de Vendôme.

On retrouve dans les papiers de Albert Rheinwald (1882-1966) conservés à la Bibliothèque de Genève, deux lettres autographes qui sont signées de ce nom : Marie Boyer de Bouillang, ce qui démontre encore une fois que les noms de famille se transforment souvent au fil du temps et des transcriptions (Cote : Ms. fr. 4891, f. 37-55).

On trouve aussi dans l’Inventaire du Fonds Vendôme-Nemours, aux Archives générales du Royaume à Bruxelles, une correspondance et une invitation adressées par Marie Boyer de Bouillane au duc et à la duchesse de Vendôme et des réponses envoyées par ces derniers (Voyez les reproductions ci-haut). Il s’agit de deux pièces intitulées « 1311 – Boyer de Bouillane (Marie). 1921, 1930 » qui font partie de 1716-1979 / J. Liénart (BE-A0510 / I 586).

Nous avons ci-dessous un accès restreint à la correspondance de Henriette de Belgique, duchesse de Vendôme et d’Alençon, reçue par Marie Boyer de Bouillane. Il n’y a pas d’enveloppes, mais la lecture et quelques allusions permettent d’identifier la destinataire. S’y ajoute quelques copies (ou brouillons?) de Marie (voir la différence d’écriture). Les lettres sont quelquefois longues sur des formats variés. Ceci est sans compter les cartes de visite ou quelques brèves. Le lot compte environ 12 lettres de 1921 (50 pages), 18 lettres de 1922 (45 pages), 13 lettres de 1923 (40 pages), 16 lettres de 1924 (environ 39 pages). Marie Boyer de Bouillane est la dame de compagnie à la cour de Neuilly. Les lettres témoignent de la vie mondaine, des réceptions, des voyages, des séjours dans les diverses propriétés. Le ton confidentiel, intime, la vie privée dévoilée montrent l’amitié sincère qui unit les deux femmes.

Correspondance de Henriette de Belgique à Marie Boyer de Bouillane. Collection de Hervé Le Moigne.

Finalement, Marie Boyer de Bouillane faisait partie du service d’honneur de Son Altesse Royale Mme la Duchesse de Vendôme lors des obsèques solennelles de S. A. R. le prince Emmanuel d’Orléans, duc de Vendôme et d’Alençon, plus tard « premier prince du sang royal de France » pour les orléanistes, célébrées le 14 février 1931 en la chapelle royale Saint-Louis de Dreux. Son frère, Charles Boyer de Bouillane, Capitaine de corvette de réserve et Chevalier de la légion d’honneur, était aussi présent à cette cérémonie où étaient réunis les membres les plus distingués de la haute noblesse.

La cérémonie était présidée par S. Gr. Mgr Harscouët, évêque de Chartres, qui a donné l’absoute. La messe a été dite par le chanoine Martin, premier aumônier de la chapelle royale, assisté du curé doyen de la paroisse de Dreux, et de l’abbé Klein, curé de Saint-Pierre de Neuilly. Dans le sanctuaire, à droite, avaient pris place LL. MM. le Roi et la Reine des Belges; à gauche, Madame la Duchesse de Guise puis, après M. de Figueira, représentent LL. MM. le Roi et la Reine de Portugal; le comte Louis d’Harcourt, représentant S.M. la Reine Amélie de Portugal; M. Bogdan Morfoff, ministre plénipotentiaire de Bulgarie, représentant S.M. le Roi des Bulgares, et le comte de La Tour-en-Voivre, représentant LL. AA. RR. Mgr le Comte et Mme la Comyesse de Caserte.

Le Figaro 15 février 1931 - L'Express du MIdi - 13 février 1931
Le Figaro (Numéro 46, 15 février 1931, page 2) et L’Express du Midi (Numéro 13.829, 13 février 1931, page 1).

Le duc et de la duchesse de Vendôme et d’Alençon

Le duc de Vendôme Emmanuel d'Orléans, son épouse la princesse Henriette de Belgique
Le duc de Vendôme Emmanuel d’Orléans, son épouse la princesse Henriette de Belgique

Emmanuel d’Orléans, duc de Vendôme et d’Alençon, né le 18 janvier 1872 à Obermais, en Italie, mort le 1er février 1931 à Cannes, en France, est un membre de la famille royale belge, apparenté à la maison d’Orléans. Le 12 février 1896, Emmanuel épouse à Bruxelles la princesse Henriette de Belgique (1870-1948), fille du prince Philippe de Belgique, comte de Flandre, et de son épouse la princesse Marie de Hohenzollern-Sigmaringen, ce qui fait du duc de Vendôme le beau-frère d’Albert Ier de Belgique. De même, Emmanuel et Henriette partagent des ancêtres communs : ils sont tous deux arrière-petits-enfants de Louis-Philippe et de la princesse Marie-Amélie de Naples et de Sicile, l’une par Louise-Marie d’Orléans, l’autre par le duc de Nemours.

Avant d’épouser une princesse de Belgique, le duc de Vendôme aurait eu une liaison secrète, de 1891 à 1893, avec Louise de Maillé de La Tour Landry (1873-1953), mariée par sa famille en 1894 au comte Ferry de Ludre, donnant naissance à un fils naturel prénommé Philippe (1893-1955).

Henriette de Belgique, qui portera après son mariage les titres de courtoisie de duchesse de Vendôme et duchesse d’Alençon, est née, ainsi que sa sœur jumelle la princesse Joséphine de Belgique, le 30 novembre 1870 à Bruxelles dans le palais que ses parents, le comte Philippe et la comtesse Marie de Flandre (frère et belle-sœur du roi Léopold II de Belgique) possèdent rue de la Régence à Bruxelles, à l’angle de la place Royale, abritant aujourd’hui la Cour des Comptes. La sœur jumelle d’Henriette mourra un mois et demi plus tard, le 18 janvier 1871.

La princesse Henriette compte parmi ses proches nombre de princes et de souverains. Elle est la sœur cadette du prince Baudouin et l’aînée de la princesse Joséphine et du roi Albert Ier (et donc la tante du roi Léopold III, du régent Charles et de la reine Marie-José d’Italie ). Henriette est également la nièce du roi Léopold II, de l’impératrice Charlotte du Mexique et du roi Carol Ier de Roumanie. Sa mère, née Marie de Hohenzollern-Sigmaringen, est un membre de la Maison de Hohenzollern (branche aînée catholique et une lointaine cousine de l’empereur allemand (le célèbre Kaiser), tout comme son beau-frère le prince Carl, époux de sa sœur cadette Joséphine.

Après une éducation soignée dispensée dans la demeure de ses parents, Henriette aura, le 23 janvier 1891, la douleur de perdre son frère Baudouin auquel une grande complicité la liait. Le 12 février 1896, Henriette épouse à Bruxelles Emmanuel d’Orléans (qui porte le titre de courtoisie de duc de Vendôme), fils du duc d’Alençon et de la duchesse née Sophie-Charlotte en Bavière, sœur de l’impératrice d’Autriche (la fameuse « Sissi »). Les jeunes époux s’installent à Neuilly-sur-Seine. Ils font figures de membres remarqués de la vie mondaine parisienne à la Belle Époque.

Cependant la popularité du couple « Vendôme » inquiète la jeune république française. Indésirables comme l’étaient, sous la IIIe République, tous les membres de la famille d’Orléans, la « duchesse de Vendôme » obtient néanmoins l’autorisation de se fixer à Lugrin, en territoire français, proche de la frontière suisse, dans le château de Blonay en Chablais dominant le lac Léman. Elle y vit simplement, formant autour d’elle un petit cercle composé de gentilshommes savoyards et de personnalités de passage dans la région. Parmi eux, le vicomte Clément de Maugny qui a inspiré le personnage de Robert de Saint-Loup dans La Recherche et, peut-être, Marcel Proust. Selon toute vraisemblance, la « duchesse de Vendôme » qui était une amie intime de Maugny, pourrait avoir été un des modèles de la marquise de Villeparisis.

La princesse Henriette meurt à Sierre (Valais, Suisse) le 28 mars 1948; elle est inhumée auprès de son époux dans la crypte de la chapelle royale de Dreux, le mausolée de la famille d’Orléans.

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